Décision de la Commission des sanctions du 22 février 2017 à l'égard de la société La Financière Desselligny et de MM. A et B

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
AMF, 22 févr. 2017, n° SAN-2017-02
Numéro : SAN-2017-02
Identifiant AMF : SAN-2017-02

Sur les parties

Texte intégral

La Commission

des sanctions

DECISION DE LA COMMISSION DES SANCTIONS À L’EGARD DE LA SOCIÉTÉ LA FINANCIÈRE DESSELLIGNY ET DE MM. A ET B

La 1ère section de la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (ci-après « AMF ») ;

Vu le règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché (règlement relatif aux abus de marché) et abrogeant la directive 2003/6/CE du Parlement européen et du Conseil et les directives 2003/124/CE, 2003/125/CE et 2004/72/CE de la Commission, notamment son article 16 ;

Vu le code monétaire et financier, notamment ses articles L. 532-9, L. 533-8, L. 533-10, L. 533-11, L. 621-15 et L. 621-17-2 ;

Vu le règlement général de l’AMF, notamment ses articles 311-3, 313-1 à 313-3, 313-6, 313-7, 313-48, 313-50, 313-53, 313-54, 313-75, 314-2, 314-3, 314-66, 315-15, 315-16, 315-18, 315-66 ;

Vu l’instruction AMF n°2008-03 du 28 mai 2008 relative à la procédure d’agrément des sociétés de gestion de portefeuil e, obligations d’information et passeport ;

Vu la position-recommandation AMF n° 2012-19 du 18 décembre 2012 ;

Vu le règlement de déontologie des OPCVM et de la gestion individualisée sous mandat de l’Association française de la gestion financière du 10 décembre 2009, et notamment son article 60 ;

Vu les notifications de griefs adressées le 3 mai 2016 à la société La Financière Desselligny ainsi qu’à MM. A et B ;

Vu la décision du 17 mai 2016 de la présidente de la Commission des sanctions désignant M. Bernard Field, membre de la Commission des sanctions, en qualité de rapporteur ;

Vu les lettres du 23 mai 2016 adressées à la société La Financière Desselligny ainsi qu’à MM. A et B les informant qu’ils disposaient de la faculté de demander la récusation du rapporteur ;

Vu les observations écrites de la société La Financière Desselligny ainsi que de

MM. A et B du 1er août 2016 en réponse aux notifications de griefs ;

Vu les procès-verbaux d’audition de la société La Financière Desselligny ainsi que de MM. A et B des 20 et 21 septembre 2016 ;

17 place de la Bourse – 75082 Paris cedex 2 – tél. 01 53 45 60 00 – fax 01 53 45 63 20 www.amf-france.org

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Vu les observations adressées par les conseils de la société La Financière Dessel igny les 21 septembre et 13 octobre 2016 à la suite de son audition par le rapporteur ;

Vu le rapport de M. Bernard Field du 16 décembre 2016 ;

Vu les lettres de convocation à la séance de la Commission des sanctions du 27 janvier 2017, auxquelles était joint le rapport du rapporteur, adressées le 19 décembre 2016 à la société La Financière Desselligny ainsi qu’à MM. A et B ;

Vu la lettre du 20 décembre 2016 informant la société La Financière Desselligny ainsi que MM. A et B de la composition de la formation de la Commission des sanctions lors de la séance et les informant de la faculté de demander la récusation de l’un ou de plusieurs de ses membres ;

Vu la lettre du 24 janvier 2017 par laquel e la présidente de la Commission des sanctions a refusé de faire droit à la demande, formulée par les mis en cause dans leurs observations en réponse aux notifications de griefs, tendant à ce que la séance de la Commission des sanctions ne soit pas publique ;

Vu les éléments complémentaires transmis par les mis en cause le 20 janvier 2017 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Après avoir entendu au cours de la séance du 27 janvier 2017 :

— M. Bernard Field en son rapport ;

- M. Hubert Gasztowtt, représentant le directeur général du Trésor, qui a indiqué ne pas avoir d’observations à formuler ;

- Mme Mathilde Gerard-Tabbagh, représentant le Collège de l’AMF ;

- la société La Financière Desselligny, représentée par M. A ;

- M. A ;

- M. B ;

- Mes Hubert de Vauplane et Hugues Bouchetemble, conseils de la société La Financière Desselligny et de MM. A et B ;

les personnes mises en cause ayant eu la parole en dernier.

I. Les faits

La société La Financière Desselligny SA (ci-après « LFD »), anciennement dénommée AAZ Finances, est une société de gestion agréée le 16 juil et 1996 pour la gestion d’organismes de placement collectif non soumis à la directive 2009/65/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juil et 2009 portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives concernant certains organismes de placement collectif en valeurs mobilières (ci-après « OPCVM »). Depuis le 27 juil et 2013, LFD relève du régime non intégral de la directive 2011/61/UE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2011 sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs.

Les dirigeants effectifs au sens de l’article L. 532-9, Il 4°, du code monétaire et financier sont M. A, président-directeur général, et M. B, administrateur, directeur général délégué et responsable de la conformité et du contrôle interne (ci-après « RCCI »).

M. A est entré au capital de la société en 2009 et occupait alors la fonction de directeur général délégué. En juin 2013, il est devenu actionnaire majoritaire et a été nommé

président-directeur général en remplacement de M. B, qui détient, avec sa famil e, environ 25% du capital.

Au 30 septembre 2014, LFD comptait 9 collaborateurs, dont 6 gérants de portefeuil es.

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Au 31 mars 2015, les activités de LFD concernaient environ 800 comptes, 500 clients, et les encours gérés, d’un montant de 154,23 mil ions d’euros, l’étaient en gestion sous mandat, à concurrence de 97 mil ions d’euros, en gestion col ective, à hauteur de 35,93 mil ions d’euros répartis sur 5 fonds d’investissement alternatifs, et en réception-transmission d’ordres (ci-après « RTO ») pour 21,3 mil ions d’euros.

II. La procédure

En application de l’article L. 621-9 du code monétaire et financier, le secrétaire général de l’AMF a décidé, le 26 août 2014, « de procéder à un contrôle portant sur le respect par La Financière Desselligny (n° Agrément : GP96005) de ses obligations professionnelles ».

Le contrôle diligenté par la direction des contrôles de l’AMF a donné lieu à l’établissement d’un rapport daté du 17 juil et 2015.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 31 juil et 2015, le secrétaire général de l’AMF a adressé le rapport de contrôle à LFD ainsi qu’à MM. A et B en leur précisant qu’ils disposaient d’un délai d’un mois pour formuler des observations.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 2 octobre 2015, LFD a transmis ses observations en réponse au rapport de contrôle.

Lors de sa séance du 30 mars 2016, la Commission spécialisée n°°2 du Collège de l’AMF, constituée en application de l’article L. 621-2 du code monétaire et financier, a décidé de notifier des griefs à LFD ainsi qu’à MM. A et B.

Les notifications de griefs ont été adressées à LFD ainsi qu’à MM. A et B par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 3 mai 2016.

Il leur est, en substance, reproché :

— le non-respect par LFD de ses conditions d’agrément et le défaut de déclaration à l’AMF de la modification d’informations figurant dans le dossier d’agrément ;

- des lacunes dans le dispositif de passation et de traçabilité des ordres, notamment des procédures et moyens techniques insuffisants ainsi que des dysfonctionnements relatifs à l’utilisation des « comptes parking », à l’affectation des ordres et à la piste d’audit ;

- des carences dans le contrôle interne ainsi qu’une méconnaissance de l’obligation de déclaration des opérations suspectes à l’AMF.

Il est également reproché à M. A un non-respect de la règlementation relative aux mandats de gestion, concernant deux clients.

En application de l’article R. 621-38 du code monétaire et financier, une copie des notifications de griefs a été adressée le 3 mai 2016 à la présidente de la Commission des sanctions qui, par décision du 17 mai 2016, a désigné M. Bernard Field en qualité de rapporteur. Cette décision a été notifiée aux mis en cause par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 26 mai 2016 leur rappelant la faculté de demander la récusation du rapporteur dans les conditions prévues par les articles R. 621-39-3 et R. 621- 39-4 du code monétaire et financier.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 23 mai 2016, les mis en cause ont été informés de la faculté dont ils disposaient d’être entendus par le rapporteur, conformément au I de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier.

Par courrier du 1er août 2016, ils ont adressé leurs observations en réponse à la notification de griefs.

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Les mis en cause ont été entendus par le rapporteur les 20 et 21 septembre 2016. A la suite de ces auditions, leur conseil a adressé un document par courrier électronique du 21 septembre 2016 et des observations par courrier du 13 octobre 2016.

Le 16 décembre 2016, le rapporteur a déposé son rapport.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 19 décembre 2016, auxquelles était joint le rapport du rapporteur, les mis en cause ont été convoqués à la séance de la Commission des sanctions du 27 janvier 2017 et informés, d’une part, qu’ils disposaient d’un délai de quinze jours pour présenter des observations en réponse au rapport du rapporteur, conformément au III de l’article R. 621-39 du code monétaire et financier, d’autre part, qu’ils avaient le droit de se faire assister de tout conseil de leur choix, en vertu du II de l’article R. 621-40 du même code.

Par lettres recommandées avec demande d’avis de réception du 20 décembre 2016, les mis en cause ont été informés de la composition de la Commission des sanctions appelée à délibérer à l’issue de la séance du 27 janvier 2017 ainsi que du délai de quinze jours dont ils disposaient pour demander la récusation d’un ou de plusieurs de ses membres, en application des dispositions des articles R. 621-39-2 à R. 621-39-4 du code monétaire et financier.

Des éléments complémentaires ont été transmis par les mis en cause le 20 janvier 2017.

Le 24 janvier 2017, la présidente de la Commission des sanctions a refusé de faire droit à la demande formulée par les mis en cause dans leurs observations en réponse aux notifications de griefs tendant à ce que la séance de la Commission des sanctions ne soit pas publique.

MOTIFS DE LA DECISION

I. Sur le grief relatif au non-respect par LFD de ses conditions d’agrément et au défaut d’information de l’AMF

Il est reproché à LFD de ne pas avoir respecté les conditions de son agrément en confiant à l’un de ses gérants travail ant depuis son domicile la gestion d’un second fonds et de ne pas avoir informé l’AMF des modalités de travail à distance d’un second gérant financier, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier et des articles 311-3 et 313-54 du règlement général de l’AMF, précisées pour partie par les dispositions de la Position-recommandation AMF n° 2012-19 du 18 décembre 2012.

Les notifications de griefs relèvent d’abord que, lors de sa demande d’agrément, LFD avait indiqué que l’un de ses gérants financiers travail erait depuis son domicile, serait doté des moyens techniques nécessaires à une telle modalité d’exercice et ne serait en charge de la gestion que d’un seul OPCVM, ce qui excluait le risque de post-affectation des ordres.

El es relèvent ensuite que LFD a transmis à l’AMF une information erronée sur les moyens techniques mis à la disposition de ce gérant, qui ne disposait notamment pas d’appareil d’enregistrement de ses conversations téléphoniques permettant de négocier ses ordres à la voix, et qu’à compter du 29 août 2014, la gestion d’un second fonds lui avait été confiée.

Elles relèvent enfin que LFD n’a pas informé l’AMF que le dispositif de gestion à distance s’appliquait à un second gérant financier qui gérait deux FCP ainsi que des portefeuil es privés et que ce dernier utilisait sa messagerie électronique personnelle pour rendre compte de ses négociations en cours et ne bénéficiait ni de machine d’horodatage ni d’appareil d’enregistrement de ses conversations téléphoniques.

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Les mis en cause répondent que les agissements reprochés n’entrent pas dans les prévisions des textes visés par les notifications de griefs.

Subsidiairement, ils soutiennent que les articles L. 532-9 du code monétaire et financier et 311-3 du règlement général de l’AMF tels que précisés par l’instruction AMF n° 2008-03 n’édictent aucune obligation d’information de l’AMF en cas de travail à distance d’un gérant financier.

En outre, ils font valoir qu’une sanction fondée sur l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, trop imprécis, serait entachée d’un défaut de légalité interne et qu’une sanction fondée sur la position- recommandation AMF n° 2012-19 serait entachée d’un défaut de légalité externe.

Les faits visés par la poursuite se situent entre le 26 août 2011, soit trois ans avant la date de l’ouverture du contrôle par le secrétaire général de l’AMF, et la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

L’article L. 532-9 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable depuis le 1er novembre 2007 et non modifiée depuis sur ce point, dispose notamment que « Les sociétés de gestion de portefeuil e doivent satisfaire à tout moment aux conditions de leur agrément ».

L’article 311-3 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable du 1er novembre 2007 au 20 décembre 2013 ordonnait : « La société de gestion de portefeuil e informe l’AMF, selon les modalités précisées dans une instruction de l’AMF, des modifications portant sur les éléments caractéristiques qui figuraient dans le dossier d’agrément initial, concernant notamment l’actionnariat direct ou indirect, la direction, l’organisation et les éléments mentionnés à la section 2 du chapitre II. L’AMF fait connaître au déclarant, par écrit, les conséquences éventuelles de ces modifications sur l’agrément délivré. ». Depuis le 23 décembre 2013, cet article énonce que « Les modifications des informations figurant dans le dossier d’agrément de la société de gestion de portefeuil e en application de l’article 311-1 font l’objet, selon les cas, d’une déclaration, notification ou demande d’autorisation préalable à l’AMF […]. Les modalités d’application du présent article sont précisées par une instruction de l’AMF ».

L’instruction prise en application de cet article est l’instruction AMF n°2008-03 du 28 mai 2008 relative à la procédure d’agrément des sociétés de gestion de portefeuil e, obligations d’information et passeport. Elle dresse une liste non exhaustive des informations susceptibles d’être modifiées, en précisant les modalités d’information ou d’autorisation à respecter, et précise que si « une modification importante de l’organisation ou de l’activité de la société de gestion de portefeuil e » non prévue par l’instruction survient, la société de gestion doit prendre « un contact préalable… avec l’AMF afin de déterminer le mode de traitement adapté. »

Le I de l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable depuis le 31 mars 2008 et non modifiée sur ce point, énonce que « La société de gestion de portefeuil e utilise en permanence des moyens, notamment matériels, financiers et humains, adaptés et suffisants ».

L’instruction précitée du 28 mai 2008 dans ses différentes versions applicables dresse une liste non exhaustive des informations susceptibles d’être modifiées en précisant les modalités d’information ou d’autorisation à respecter et prévoit que si « une modification importante de l’organisation ou de l’activité de la société de gestion de portefeuil e » non prévue par l’instruction survient, celle-ci doit prendre « un contact préalable […] avec l’AMF afin de déterminer le mode de traitement adapté ».

Ces textes, appliqués en matière administrative et non pénale, se réfèrent aux obligations auxquel es les mis en cause sont soumis en raison de l’activité qu’ils exercent. Les articles L. 532-9 du code monétaire et financier et 311-3 du règlement général de l’AMF prescrivent que les sociétés de gestion de portefeuil e doivent satisfaire à tout moment aux conditions de leur agrément et que les modifications des informations figurant dans le dossier d’agrément font l’objet, selon les cas, d’une déclaration, d’une notification ou d’une demande d’autorisation préalable, tandis que l’instruction du 28 mai 2008 donne, à titre indicatif, une liste des informations susceptibles d’être modifiées.

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Contrairement à ce qui est soutenu par les mis en cause, ces textes créent donc des obligations suffisamment précises, dont la méconnaissance est susceptible de permettre la caractérisation d’un manquement.

Le travail à distance d’un gérant financier est une modalité d’exercice, porteuse de risques en termes de gestion des conflits d’intérêts, de confidentialité ou encore de contrôle de l’activité, qui nécessite un encadrement spécifique, notamment en ce qui concerne les moyens mis à disposition, afin d’assurer la traçabilité de l’activité et le contrôle des risques et de la conformité.

Il constitue donc une modification importante de l’organisation de la société de gestion de portefeuille.

En l’espèce, le programme d’activité de la société ne prévoyait pas que l’activité des gérants pouvait être exercée à distance. Une seule adresse était indiquée. Les moyens techniques qui y étaient décrits, composés notamment d’une seule machine d’horodatage et d’une seule imprimante, ne permettaient d’ail eurs cet exercice que dans un lieu unique.

Par ail eurs, lorsque LFD a fait savoir à l’AMF qu’elle fermait sa succursale, des échanges ont eu lieu avec l’AMF entre mai et juil et 2008 afin qu’elle s’explique sur les conditions d’exercice de l’activité de l’un de ses gérants devenu ainsi gérant à distance. L’AMF avait alors souligné le caractère insuffisant des contrôles prévus par la société, ce qui avait conduit cette dernière à les préciser. LFD a notamment adressé à l’AMF le 5 juin 2008 un document intitulé : « Annexe / Mise à jour du programme d’activité /sur le point particulier du gérant délocalisé M… ».

Il en résulte que LFD ne pouvait ignorer que les conditions de l’activité de gestion à distance étaient un élément du programme d’activité et devaient donc, en cas de modification, faire l’objet, à tout le moins, d’une information de l’AMF.

Force est cependant de constater que LFD n’a informé l’AMF ni du fait que la gestion d’un second fonds avait été confiée, à compter du 29 août 2014, à un gérant qui travail ait à son domicile, ni des moyens mis à la disposition de ce dernier. El e n’a pas non plus porté à sa connaissance le fait que, depuis le 24 août 2004, le dispositif de gestion à distance s’appliquait à un second gérant financier qui gérait deux FCP ainsi que des portefeuil es privés.

Dès lors, en omettant d’informer l’AMF, LFD a manqué aux dispositions de l’article 311-3 du règlement général de l’AMF qui imposent a minima l’information de l’AMF en cas de modification des informations figurant dans le dossier d’agrément.

De surcroît, en exerçant son activité dans des conditions différentes de celles prévues dans son agrément, LFD n’a pas satisfait, à tout moment, aux conditions de son agrément, en violation des dispositions de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier.

En revanche, il convient de relever que si elles visent l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, les notifications de griefs ne relèvent aucun fait susceptible de caractériser un manquement à ce texte.

Sur les griefs relatifs aux lacunes dans le dispositif de passation et de traçabilité des ordres

II.1 Sur les procédures et les moyens techniques

Il est reproché à LFD, d’une part, la mise en place de procédures encadrant la passation des ordres insuffisantes pour assurer la traçabilité des ordres, en particulier leur pré-affectation, notamment en ce qu’elles ne prévoyaient pas l’enregistrement des conversations téléphoniques des ordres passés à la voix, d’autre part, l’utilisation de moyens techniques qui ne permettaient pas d’assurer la traçabilité des ordres émis et l’inaltérabilité de la piste d’audit.

—  7 -

Les mis en cause répliquent que les procédures prévoyaient bien un horodatage des ordres, tout en reconnaissant que le processus d’horodatage aurait mérité des précisions qui ont été apportées après le contrôle, et que l’achèvement des évolutions en cours à l’époque des opérations de contrôle a permis d’assurer une traçabilité totale des ordres sur actions.

Ils ajoutent qu’il n’est pas interdit que la procédure de passation des ordres reprenne les termes d’une procédure applicable ail eurs qu’au sein de la société de gestion.

Ils soutiennent qu’aucun texte n’impose ni d’enregistrer les conversations téléphoniques des gérants, ni de recourir à un outil informatisé, plutôt qu’à un dispositif de main courante sous format papier, pour assurer la traçabilité des ordres. Ils font également valoir que les horodateurs sont désormais mis à jour et scellés et qu’aucun gérant exerçant son activité à l’extérieur des locaux de la société ne dispose d’habilitation pour passer directement les ordres.

— Sur les procédures

Les faits visés par la poursuite se situent entre le 26 août 2011, soit trois ans avant la date de l’ouverture du contrôle par le secrétaire général de l’AMF, et la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

Le 1 de l’article L. 533-10 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable depuis le 1er novembre 2007 et non modifiée sur ce point, dispose que « Les prestataires de services d’investissement doivent […] mettre en place des règles et procédures permettant de garantir le respect des dispositions qui leur sont applicables ».

L’article 313-1 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007, précise que « Le prestataire de services d’investissement établit et maintient opérationnel es des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non- conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier ainsi que les risques en découlant et à minimiser ces risques […] ».

En premier lieu, au moment du contrôle, LFD disposait d’une « Procédure opérationnelle n°3 : passation d’ordres » du 14 juin 2006. Celle-ci mentionnait, en préambule, un principe de pré-affectation des ordres et prévoyait l’inscription des ordres passés pour les clients et les FCP sur une main courante en format papier tenue par les gérants ainsi que l’horodatage de tous les ordres sur titres vifs. Toutefois, elle n’assurait pas le caractère inaltérable de cette main courante, n’organisait pas la traçabilité des différentes étapes de la passation des ordres, et ne précisait pas le moment auquel l’horodatage devait intervenir. Elle ne garantissait donc pas la traçabilité des ordres, pas plus qu’elle ne permettait d’en figer l’affectation avant leur émission et, partant, présentait des insuffisances.

A la même époque, LFD était également dotée d’une « Procédure de contrôle de l’activité de passation des ordres » du 5 décembre 2007 qui évoquait les « comptes parking », ou comptes de stockage, dont l’objet est de stocker les titres dans l’attente de l’exécution complète de l’ordre. Alors que de tels comptes, par leur objet même, sont porteurs d’un risque de post-affectation, la procédure ne détail ait pas les modalités de leur contrôle, par exemple en prévoyant la vérification des conditions de recours à ces comptes et du correct dépouil ement des ordres. M. A, en qualité de représentant de LFD, a d’ail eurs déclaré au rapporteur lors de son audition qu’« il n’y avait pas de procédure de contrôle de l’usage de ces comptes » tout en faisant valoir que ceux-ci étaient « contrôlés quotidiennement par le contrôle de second niveau ».

Ensuite, plusieurs mois après le début des opérations de contrôle, LFD a mis en place une « Procédure de traitement des ordres » datée de décembre 2014, destinée à compléter des procédures existantes afin d’y intégrer le recours à une table de négociation externalisée dénommée Y. LFD s’est cependant bornée à recopier la procédure interne d’Y, conçue pour les opérateurs d’Y et qui, par exemple, comportait des développements intéressant les négociateurs, sans supprimer ce qui était inutile ni ajouter ce qui était étranger à la table de négociation Y. La procédure, qui n’a pas été adaptée à l’activité des gérants de LFD, n’était donc pas opérationnelle.

—  8 -

Enfin, l’enregistrement des conversations téléphoniques, qui permet de conserver une trace des ordres passés à la voix, était uniquement évoqué dans la procédure d’archivage des données de juin 2010. Or, cette procédure renvoyait à l’enregistrement des conversations téléphoniques auquel devaient procéder les intermédiaires contactés par les gérants sans prévoir de dispositif de remise de ces enregistrements. De surcroît, l’enregistrement des ordres transmis par téléphone à LFD par ses clients dans le cadre de son service de RTO n’était pas prévu. Ainsi, pour les ordres passés à la voix, LFD ne disposait pas de procédure opérationnel e lui permettant, ainsi qu’à l’AMF, d’accéder facilement aux informations pertinentes, comme l’impose l’article 313-50 du règlement général de l’AMF.

Il résulte de ce qui précède qu’en ne disposant pas de procédures adéquates et opérationnelles permettant d’assurer le respect de ses obligations professionnelles relatives, notamment, à l’affectation prévisionnelle des ordres, à la traçabilité de la piste d’audit des ordres et à l’usage des « comptes parking », LFD a contrevenu aux dispositions des articles L. 533-10 du code monétaire et financier et

313-1 du règlement général de l’AMF.

- Sur les moyens techniques utilisés

L’article L. 533-8 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable depuis le 1er novembre 2007, dispose que « Les prestataires de services d’investissement conservent, dans les conditions fixées par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers, les informations pertinentes relatives à toutes les transactions sur instruments financiers qu’ils ont conclues ».

L’article 313-48 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 21 décembre 2013 qui reprend en substance les dispositions antérieures, précise : « I. – 1° La société de gestion de portefeuil e prend les mesures nécessaires pour se doter de systèmes électroniques adaptés, permettant l’enregistrement rapide et correct des informations relatives à chaque opération de portefeuil e mentionnées au II. / 2° El e veil e à ce que le traitement électronique des données se déroule en toute sécurité et assure, en tant que de besoin, l’intégrité et la confidentialité des informations enregistrées. / II. – El e veil e à ce que pour chaque opération de portefeuil e concernant le placement collectif mentionné à l’article 311-1 A, un enregistrement d’informations suffisant pour permettre la reconstitution des détails de l’ordre et de l’opération exécutée soit effectué sans délai ».

L’article 313-50 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007, précise également : « Les enregistrements sont conservés sur un support qui permet le stockage d’informations de telle façon qu’ils puissent être consultés par l’AMF, sous une forme et d’une manière qui satisfont aux conditions suivantes : / 1° L’AMF doit pouvoir y accéder facilement et reconstituer chaque étape clé du traitement de toutes les transactions ; / 2° Il doit être possible de vérifier aisément le contenu de toute correction ou autre modification, ou l’état des enregistrements antérieurs à ces corrections ou modifications ; / 3° Il ne doit pas être possible de manipuler ou altérer les enregistrements de quelque façon que ce soit ».

Enfin, le I de l’article 313-54 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 31 mars 2008, énonce que « La société de gestion de portefeuil e utilise en permanence des moyens, notamment matériels, financiers et humains, adaptés et suffisants ».

Pendant la période couverte par le contrôle, les gérants de LFD ont inscrit les ordres passés sur des mains courantes au format papier, supports qui, en l’absence d’autre procédé en sécurisant l’utilisation, ne permettent pas de satisfaire aux exigences de traçabilité et d’inaltérabilité de la piste d’audit. Les documents ainsi établis comportent d’ail eurs de nombreuses ratures impossibles à dater, de sorte qu’il ne peut être vérifié si elles sont antérieures à l’émission de l’ordre ou même à son exécution.

Par ail eurs, l’un des trois horodateurs de LFD accusait un retard de dix minutes, connu du dirigeant de la société qui n’y a pas remédié, et aucun de ces appareils ne disposait de plombage, de scellé ou de tout autre moyen assurant le caractère inaltérable et fiable de l’horodatage. En outre, l’un des gérants de LFD,

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qui exerçait son activité à distance, ne disposait pas d’horodateur. Ainsi, les moyens utilisés pour procéder à l’horodatage ne garantissaient pas l’existence d’une piste d’audit complète et fiable.

Enfin, les postes des deux gérants qui exerçaient à distance n’étaient pas équipés d’un dispositif enregistrant les appels téléphoniques entrants et sortants.

Quant aux postes des autres gérants, ils étaient dotés d’un matériel qui avait mal fonctionné entre le 3 janvier et le 30 septembre 2014, seuls les appels sortants ayant été enregistrés dans un premier temps puis, à compter du 4 septembre, aucun appel, entrant ou sortant.

De surcroît, bien qu’ayant prévu de recourir aux enregistrements téléphoniques de ses intermédiaires, LFD n’avait pas convenu avec eux qu’ils lui en communiquent une copie. Dès lors, LFD n’était pas dotée des moyens lui permettant d’assurer la traçabilité des ordres négociés à la voix par téléphone.

Il résulte de ce qui précède que LFD ne disposait pas des moyens techniques permettant d’assurer la traçabilité des ordres émis et l’inaltérabilité de la piste d’audit et, partant, qu’elle n’a pas satisfait aux exigences des articles L. 533-8 du code monétaire et financier et 313-48, 313-50 et 313-54 du règlement général de l’AMF.

II.2 Sur les dysfonctionnements relatifs à l’utilisation des comptes parking, à l’affectation des ordres et à la piste d’audit

— Sur l’utilisation des « comptes parkings » non conforme aux procédures

Il est reproché à LFD de ne pas avoir respecté ses procédures relatives à l’utilisation des « comptes parking » d’une part en s’adressant, alors que celles-ci l’interdisaient, à des intermédiaires autres que CM-CIC Securities, d’autre part en stockant les titres au-delà de la durée maximum de trois jours prévue par lesdites procédures, enfin en recourant à de tels comptes même en cas d’exécution totale d’une quantité passée sur le marché, hypothèse dans laquelle leur utilisation était exclue.

Les mis en cause objectent que le recours à d’autres intermédiaires était bien prévu par la procédure.

Ils font également valoir que le délai de stockage était, le plus souvent, de trois jours et que sa durée maximale était, en pratique, de cinq jours, ce qui permettait de prendre en compte les opérations pour établir la valeur liquidative des fonds, calculée chaque semaine. Ils ajoutent que les dépassements de délai étaient sans incidence significative sur cette valeur et qu’ils permettaient, dans l’intérêt des porteurs de parts, d’éviter des frais de dépouil ement trop fréquents et supérieurs aux plus-values dégagées par les opérations.

Enfin, ils contestent la méthode de calcul utilisée par la mission de contrôle.

Les faits visés par la poursuite se situent entre le 26 août 2011, soit trois ans avant la date de l’ouverture du contrôle par le secrétaire général de l’AMF, et la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

L’article 313-1 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007, précise que « Le prestataire de services d’investissement établit et maintient opérationnelles des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier ainsi que les risques en découlant et à minimiser ces risques […] ».

D’une part, la procédure relative au contrôle de la passation des ordres prévoyait bien la possibilité pour les gérants de LFD de s’adresser à des intermédiaires autres que CM-CIC Securities. Le recours à Tradition Securities And Futures et à la société Gilbert Dupont, relevé par la mission de contrôle, n’est donc pas de nature à établir le caractère non opérationnel de cette procédure.

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D’autre part, en revanche, l’examen d’un échantil on de 293 transactions postérieures au 1er janvier 2012 a permis de constater que le stockage sur un « compte parking » avait duré plus de trois jours dans 25% des cas et au moins 7 jours ouvrés dans 12,5% des cas. Il s’ensuit que la durée de stockage prévue par la procédure, de trois jours au plus, n’était pas respectée et, dès lors, que cette procédure n’était pas opérationnel e, peu important que le stockage ait été prétendument conforme à l’intérêt financier des clients. A cet égard, il convient de relever que l’absence de dépouil ement des titres stockés empêche de calculer la valeur liquidative exacte des fonds concernés et de connaître la composition précise de leur actif, qui sert notamment à mesurer les risques, au détriment de l’impératif de protection des porteurs de parts.

Enfin, il convient de rappeler que les « comptes parking » ont pour fonction de stocker les titres dans l’attente de l’exécution totale de l’ordre, exécution qui permettra l’inscription de l’opération au compte du ou des clients pour lesquels l’ordre a été passé.

C’est pourquoi la procédure de passation des ordres indique que « l’exécution totale d’une quantité passée sur le marché à l’achat comme à la vente ne permet pas d’utiliser les comptes dits « parking » ».

Or, l’analyse de la piste d’audit des ordres relatifs à 11 transactions obligataires, sur les 20 composant l’échantil on, démontre que chacune de ces transactions regroupait plusieurs ordres dont l’exécution avait été partielle mais était terminée, d’autres ordres étant venus les remplacer, et que les titres concernés étaient restés stockés jusqu’à ce qu’il soit procédé au dépouil ement de l’ensemble des titres correspondant à la transaction, contrairement aux prescriptions précitées de la procédure.

De surcroît, la procédure mise en place par LFD précisait que les « comptes parking » étaient des « comptes de stockage en attente d’inscription en compte individualisée ». Cependant, certains titres stockés ont été vendus par le gérant sans avoir fait l’objet d’un dépouil ement sur le compte du fonds pour lequel ils avaient été achetés. Cette pratique, qui n’est pas conforme à la procédure, a été confirmée par LFD.

Il est donc établi que la procédure applicable en matière d’utilisation des « comptes parking » n’était pas respectée et, partant, qu’elle n’était pas opérationnelle, contrairement aux exigences de l’article 313-1 du règlement général de l’AMF.

— Sur l’obligation d’affectation prévisionnelle des ordres

Les notifications de griefs reprochent à LFD de ne pas avoir respecté, dans de nombreux cas, l’obligation d’affectation prévisionnelle des ordres émis par les gérants. En ce sens, elles relèvent que l’examen d’un échantil on de 325 transactions issues de 94 ordres passés entre le 1er janvier 2012 et le 15 octobre 2014 a fait apparaître que seules 17,54% d’entre el es avaient fait l’objet d’une affectation effective et traçable avant l’émission de l’ordre et que, parmi les transactions affectées après l’émission, 66,14% d’entre elles l’avaient été après leur exécution, c’est-à-dire à cours connu.

L’article 314-66 IV du même règlement, prévoit que « Le prestataire de services d’investissement qui gère […] ou qui fournit le service de gestion de portefeuil e définit a priori l’affectation prévisionnelle des ordres qu’il émet », dispositions dont il résulte que l’exigence d’affectation prévisionnel e des ordres implique d’affecter l’ordre à un compte avant son émission, et non pas avant son exécution.

Les faits reprochés se sont déroulés du 1er janvier 2012 au 15 octobre 2014, période durant laquel e les transactions analysées ont été effectuées.

Il résulte du rapport de contrôle que les transactions non incluses dans la proportion de 17,54% précitée comprennent celles qui auraient été post-affectées (39,08%) et celles dont l’affectation n’aurait pu être vérifiée (43,88%).

Les mis en cause contestent la post-affectation de quatre ordres de l’échantil on comme cel e des ordres passés dans le cadre de l’activité de RTO, selon eux pré-affectés par nature, ainsi que le comptage par transaction et non par ordre. Ils soutiennent que le taux d’affectation prévisionnelle s’établit à 61,70% des ordres et même à 67% en ajoutant les transactions post-affectées mais affectées avant leur exécution.

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Il convient donc d’abord d’examiner les quatre ordres qui font l’objet d’une divergence d’appréciation entre les mis en cause et la mission de contrôle quant au moment de leur affectation.

Le premier concerne un achat de titres Boiron. Il a été exécuté le 3 janvier 2012 à 11 h 12 et affecté dans le système SOFI à 11 h 16. Il a donc été affecté après son exécution.

Le deuxième porte sur un achat de titres Electricité de Strasbourg. La simulation SOFI et le courriel produit par les mis en cause pour réfuter le constat de post-affectation de la mission de contrôle portent des dates et des montants qui ne correspondent pas à cet ordre. Ils ne peuvent donc établir sa pré-affectation.

Le troisième, qui concerne un achat de 1 000 titres Electricité de Strasbourg, a été passé le 8 février 2012 à 10 h 40. Les documents communiqués par les mis en cause pour contester le constat de post-affectation de la mission de contrôle, outre qu’ils ne sont pas horodatés à un moment antérieur à la passation de l’ordre, mentionnent une quantité de titres différente de celle de l’ordre examiné. Par ail eurs, l’un des comptes bénéficiaires de la transaction ne s’est pas vu affecter de titres lors du dépouil ement de l’ordre intervenu le 10 décembre 2012, sans que cette post-affectation ait alors fait l’objet d’une mention traçable ou d’une justification. L’ordre en cause n’a donc pas été pré-affecté.

Le dernier ordre est constitué de deux transactions dans le cadre d’un « roll » de future de taux. L’affectation prévisionnelle ne résulte pas formellement des tickets d’ordres, mais les deux contrats objets des transactions ont été affectés au même fonds. Le bénéficiaire du « roll » n’ayant pas changé, l’ordre peut être considéré comme pré-affecté.

Il convient ensuite de faire la même recherche sur les ordres passés dans le cadre du service de réception transmission d’ordres (ci-après : « RTO »)

Les mis en cause soutiennent sans le démontrer que les tables des intermédiaires auxquels LFD transmettait ses ordres acceptaient uniquement ceux qui étaient associés au compte d’un client ou encore que l’affectation des ordres passés par la plateforme ERABLE ne pouvait être modifiée.

Dans ces conditions, il y a lieu de rechercher si les 33 transactions résultant de l’activité de RTO présentes dans l’échantil on ont fait l’objet d’une pré-affectation.

Parmi les 33 transactions examinées, 25 ont été comptabilisées comme passées à la voix. Sur ces 25 transactions, 18 ne peuvent pas être vérifiées, à défaut d’horodatage et de formalisme de la transmission au broker. Les 7 autres correspondent à un ordre groupé. La main courante a certes été horodatée après la passation de l’ordre à l’intermédiaire mais les inscriptions figurant sur les « fiches RTO » de 6 d’entre elles permettent, selon les contrôleurs, de les considérer comme pré-affectées. Tel n’est pas le cas, en revanche, pour la septième transaction, dont l’affectation, tracée par la seule main courante, est postérieure à la passation de l’ordre auprès de l’intermédiaire.

Les 8 transactions restantes, sur les 33 analysées, ont toutes été passées par le système de routage électronique ERABLE. 4 d’entre elles ont été pré-affectées. Une autre présente une « fiche RTO » postérieure à la passation de l’ordre par LFD auprès de son intermédiaire, ce dont il se déduit que l’ordre a été post-affecté. Pour les 3 dernières, l’existence d’une pré-affectation n’est pas vérifiable, en l’absence de « fiche RTO » et de main courante.

Ainsi, parmi les 33 transactions issues de l’activité de RTO de l’échantil on, 10 ont été pré-affectées, 2 post- affectées et 21 ne sont pas vérifiables.

Enfin, les mis en cause reprochent à la mission de contrôle d’avoir effectué des calculs par transaction, et non par ordre, alors que l’exigence d’affectation prévisionnelle s’applique aux ordres.

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Les deux méthodes sont possibles. Cependant, en cas de passation d’ordres groupés, qui peuvent donner lieu à plusieurs transactions dont certaines ont été pré-affectées et d’autres non, le calcul par transaction permet de parvenir à un résultat plus précis. En revanche, le calcul par ordres est, en l’espèce, plus favorable aux mis en cause.

Au total, un calcul par nombre de transactions conduit à retenir que 18% ont été pré-affectées, 38% ne l’ont pas été et 44% ne sont pas vérifiables, tandis que ces pourcentages s’élèvent, respectivement, en comptant par nombre d’ordres, à 36%, 25% et 38%.

En conséquence, LFD a manqué aux exigences des articles 313-50 et 314-66 du règlement général de l’AMF en ne respectant pas son obligation d’affectation prévisionnel e des ordres, dans une proportion de, selon la méthode utilisée, 38% du nombre des transactions ou 25% du nombre des ordres composant l’échantil on examiné par la mission de contrôle.

Quant au manquement tenant au caractère altérable de la piste d’audit, s’il est bien invoqué dans le titre du paragraphe des notifications de griefs sur le non-respect de l’affectation prévisionnelle des ordres, il ne fait l’objet d’aucun développement dans ce paragraphe. Il recoupe en outre partiel ement le grief relatif à la reconstitution de la piste d’audit des ordres qui sera examiné ci-après et dont il constitue un des aspects.

— Sur l’inaltérabilité et la reconstitution de la piste d’audit des ordres

Les notifications de griefs reprochent à LFD de ne pas avoir mis en place un dispositif de passation des ordres permettant de reconstituer leur piste d’audit et de ne pas avoir disposé d’une piste d’audit inaltérable.

El es relèvent que la pré-affectation des 325 transactions de l’échantil on examiné n’a pu être vérifiée dans 43,38% des cas, faute d’une traçabilité suffisante des ordres, et, plus globalement, qu’en ajoutant les transactions obligataires antérieures au 1er septembre 2014 de l’un des deux gérants exerçant à distance, soit un total de 357 transactions, 92% d’entre elles ne présentaient pas une traçabilité suffisante permettant de déterminer de façon précise la chronologie de la passation des ordres.

Les mis en cause contestent les chiffres retenus. Selon eux, en procédant à un calcul par ordre, et non par transaction, la pré-affectation n’était pas vérifiable dans 18,09% des cas, soit 17 ordres de l’échantil on de 325 transactions, et seuls 76% des ordres de l’échantil on de 357 transactions ne bénéficiaient pas d’une traçabilité suffisante. Ils font notamment valoir qu’il était techniquement impossible de transmettre un ordre non pré-affecté dans le cadre du service de RTO et considèrent en conséquence que 100% des ordres correspondants étaient pré-affectés.

Afin d’être conforme aux exigences des articles L. 533-8 du code monétaire et financier et 313-48 et 313-50 du règlement général de l’AMF, déjà cités, la piste d’audit des ordres doit permettre de contrôler chaque étape-clé d’une transaction. El e doit donc contenir l’ordre initial du client dans le cadre d’une activité de RTO, les caractéristiques techniques de l’ordre, son affectation prévisionnelle, son émission, son exécution et son retour d’exécution ainsi que toutes les modifications intervenues entre l’ordre initial et le retour d’exécution et chacune des étapes doit être horodatée.

Il a été démontré que, contrairement aux allégations des mis en cause, les ordres transmis dans le cadre de l’activité de RTO n’avaient pas toujours fait l’objet d’une affectation prévisionnel e, laquelle, de surcroît, ne suffit pas à établir l’existence d’une piste d’audit complète, de sorte que l’argument en défense présenté à ce sujet est inopérant.

Quant au calcul par ordre, et non par transaction, proposé par les mis en cause, il est sans influence sur la matérialité des faits reprochés.

Il en résulte que 76% des ordres de l’échantil on, correspondant à 92% des transactions examinées, présentaient une traçabilité insuffisante.

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Par ail eurs, il a été constaté que les fiches établies par le chargé de RTO l’étaient au format papier et retraçaient différentes phases du processus – réception de l’ordre, transmission au broker et retour d’exécution – sans que les mentions successives inscrites ne soient horodatées, hormis lors de la première étape. La piste d’audit pouvait donc être altérée.

Les mesures qui auraient par la suite été mises en place en vue de remédier aux dysfonctionnements constatés sont dépourvues d’incidence sur la caractérisation du manquement.

Il résulte de ce qui précède que LFD n’a pas satisfait aux exigences des articles L. 533-8 du code monétaire et financier et 313-48 et 313-50 du règlement général de l’AMF.

La nature et l’ampleur des différentes insuffisances relevées au II conduisent en outre à retenir que LFD n’a pas agi « d’une manière honnête, loyale et professionnelle, servant au mieux les intérêts des clients » et, ainsi, a méconnu les dispositions des articles L. 533-11 du code monétaire et financier et 314-3 du règlement général de l’AMF.

II. Sur le grief relatif au défaut de contrôle interne

Il est reproché à LFD de nombreuses carences du contrôle interne, un manque d’expertise de la fonction de conformité et l’absence de déclaration d’une opération suspecte, en violation des dispositions de l’article L. 621-17-2 du code monétaire et financier, repris en substance à l’article 16 du règlement n° 596/2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché, et des articles 313-1, 313-2, 313-3, 313-7, 313-53, 313-75, 315-43, 315-15, 315-16 et 315-18 du règlement général de l’AMF.

III.1 Sur les carences du contrôle interne

Les notifications de griefs reprochent, en premier lieu, à LFD de ne pas avoir disposé, jusqu’au 1er juil et 2013, d’un contrôle formalisé de second niveau de la passation des ordres puis, à compter de cette dernière date, de ne pas s’être assurée que les contrôles de second niveau réalisés par le cabinet X (ci- après « X ») étaient correctement documentés.

En deuxième lieu, aucun plan annuel de la conformité et du contrôle interne n’aurait prévu le contrôle des ordres faisant l’objet d’un parking et aucun contrôle particulier des activités des deux gérants travail ant en dehors des locaux parisiens de LFD n’aurait été organisé.

En troisième lieu, en l’absence de dispositif de gestion de la circulation des informations privilégiées au sein de LFD, M. B n’aurait pas été en mesure d’assurer un contrôle adéquat de cette circulation.

Enfin, en tant que RCCI, M. B n’aurait pas tenu la direction de LFD informée des résultats de ses contrôles.

Les mis en cause répondent en premier lieu qu’avant le 1er juil et 2013, on ne peut conclure à l’absence de contrôle de second niveau, puisqu’il existait des fiches le formalisant. Ils précisent que la petite tail e de LFD justifie que les contrôles de premier et de second niveau aient été effectués par la même personne, M. B. Selon eux, le caractère sommaire du rapport annuel s’explique par le résultat des contrôles semestriels qui ne faisait apparaître aucun dysfonctionnement. Ils ajoutent qu’à compter du 1er juil et 2013, le contrôle de second niveau a été confié à X, dont les contrôles étaient formalisés et respectaient le plan de contrôle en termes de calendrier et de points de contrôle, de sorte qu’ayant donné à ce tiers les moyens d’accomplir sa mission, LFD ne peut être tenue pour responsable de dysfonctionnements imputables à ce dernier.

Les mis en cause relèvent en deuxième lieu que le contrôle des « comptes parking » de titres obligataires est réalisé dans les mêmes conditions qu’à l’époque du contrôle réalisé par le régulateur en 2002, lequel n’avait relevé aucune difficulté, et que le stockage des actions fait l’objet d’un contrôle quotidien. Ils font également valoir que X n’a jamais émis de réserves sur les conditions dans lesquelles les gérants travail ant à distance exerçaient leur activité.

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En troisième lieu, ils soulignent que LFD refuse désormais de participer à des sondages de marché pour éviter toute difficulté, reconnaissent que le dispositif de prévention des abus de marché méritait d’être complété et indiquent qu’après l’intervention de l’AMF, le contrôle de cet aspect de la règlementation a été confié à un cabinet extérieur.

Les faits reprochés se sont déroulés à compter du 26 août 2011, soit trois ans avant la date des ordres de mission établis par le secrétaire général de l’AMF, et jusqu’à la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

Le dispositif de conformité est notamment régi par les articles suivants du règlement général de l’AMF :

L’article 313-1, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007, dispose que « Le prestataire de services d’investissement établit et maintient opérationnel es des politiques, procédures et mesures adéquates visant à détecter tout risque de non-conformité aux obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier ainsi que les risques en découlant et à minimiser ces risques […] ».

Le I, 1° de l’article 313-2, dans sa rédaction applicable à compter du 28 août 2008 et non modifiée depuis sur ce point, précise : « I. – Le prestataire de services d’investissement établit et maintient opérationnelle une fonction de conformité efficace exercée de manière indépendante et comprenant les missions suivantes : / 1° Contrôler et, de manière régulière, évaluer l’adéquation et l’efficacité des politiques, procédures et mesures mises en place en application de l’article 313-1, et des actions entreprises visant à remédier à tout manquement du prestataire de services d’investissement et des personnes concernées à leurs obligations professionnelles […] ».

L’information des dirigeants des prestataires de services d’investissement sur le contrôle interne est prévue par l’article 313-7 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007 et non modifiée sur ce point, aux termes duquel « Le prestataire de services d’investissement veil e à ce que ses dirigeants reçoivent, de manière fréquente et au moins une fois par an, des rapports sur la conformité, le contrôle des risques et le contrôle périodique indiquant en particulier si des mesures appropriées ont été prises en cas de défail ances ».

La conservation des données relatives aux contrôles de conformité est prévue par l’article 313-53 du règlement général de l’AMF qui, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007, énonce que « […] le prestataire de services d’investissement s’assure de la conservation des informations relatives aux contrôles et aux évaluations mentionnés au I de l’article 313-2 ».

L’article 313-75 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 28 septembre 2007 et non modifiée depuis sur ce point, précise les effets du recours à l’externalisation en prévoyant que « la société de gestion qui externalise une tâche ou fonction opérationnelle reste pleinement responsable du respect de toutes ses obligations professionnel es ».

Enfin, les articles 315-15, 315-16 et 315-18 du règlement général de l’AMF comportent des dispositions destinées à prévenir la circulation indue d’informations privilégiées :

L’article 315-15, dans sa rédaction applicable à compter du 28 août 2008 et non modifiée depuis, dispose que « Le prestataire de services d’investissement établit et garde opérationnelles des procédures appropriées de contrôle de la circulation et de l’utilisation des informations privilégiées au sens des articles 621-1 à 621-3 en tenant compte des activités exercées par le groupe auquel il appartient et de l’organisation adoptée au sein de celui-ci […] ».

L’article 315-16, dans sa rédaction applicable à compter du 21 décembre 2013 reprenant en substance la rédaction antérieure sur ce point, précise que « Afin d’assurer le respect de l’obligation d’abstention prévue aux articles 622-1 et 622-2, le prestataire de services d’investissement établit et garde opérationnel e une procédure appropriée organisant la surveil ance des émetteurs et des instruments financiers sur lesquels il dispose d’une information privilégiée […] ».

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Le II de l’article 315-18, dans sa rédaction applicable à compter du 28 août 2008 et non modifiée depuis, indique que « […] le responsable de la conformité établit une liste d’interdiction. El e recense les émetteurs ou les instruments financiers pour lesquels le prestataire de services d’investissement doit restreindre ses activités ou cel es des personnes concernées en raison : / 1° Des dispositions légales ou réglementaires auxquelles il est soumis autres que celles résultant des obligations d’abstention prévues aux articles 622-1 et 622-2 ; / 2° De l’application d’engagements pris à l’occasion d’une opération financière […] ».

— Sur le contrôle de la passation des ordres

Si les plans annuels de la conformité et du contrôle interne (ci-après « PCCI ») établis à compter du second semestre 2013 ont prévu un contrôle quotidien du traitement des ordres par les gérants ainsi qu’un contrôle trimestriel de second niveau réalisé par X, ceux de 2011, 2012 et du premier semestre 2013 ne prescrivaient aucun contrôle de la passation des ordres, hormis un contrôle par sondage de ceux reçus dans le cadre de l’activité de RTO.

Le contrôle de second niveau relatif à la passation des ordres relevait, jusqu’au 1er juil et 2013, de M. B, qui réalisait celui de premier niveau, et ne pouvait donc être indépendant.

En tout état de cause, LFD ne disposait alors d’aucune méthodologie de contrôle et n’a pu fournir aucun document établissant l’étendue, ou même l’existence, de contrôles de second niveau, les pièces produites à cette fin étant constituées de simples relevés d’opérations et de soldes d’espèces ou relevant du contrôle du respect des ratios.

Ainsi, jusqu’au 1er juil et 2013, aucun contrôle de second niveau relatif à la passation des ordres n’était réalisé au sein de LFD.

A compter du 1er juillet 2013, le contrôle de second niveau a été confié à X, qui a effectué un contrôle trimestriel de la passation des ordres, fréquence conforme au PCCI mis en place depuis cette date.

Cependant, LFD a été dans l’impossibilité de fournir les documents contrôlés par X, ou même leur liste ou encore des éléments sur la méthodologie suivie, de sorte que l’étendue des vérifications effectuées n’a pu être déterminée.

Au demeurant, celles-ci n’ont pas permis de détecter la plupart des lacunes relevées au paragraphe II, notamment le caractère altérable des mains courantes au format papier, l’absence de traçabilité des modifications qui y étaient apportées et leur horodatage non fiable.

Or, contrairement aux allégations des mis en cause, LFD demeurait responsable du respect de ses obligations professionnelles en dépit de l’externalisation du contrôle de second niveau auprès de X, conformément aux dispositions précitées de l’article 313-75 du règlement général de l’AMF.

— Sur le contrôle des « comptes parkings »

Aucun contrôle des « comptes parking » n’était prévu par les PCCI.

Il n’est pas établi que les pièces produites par les mis en cause – relatives au suivi de l’activité au quotidien ou constituées de fichiers de suivi des « comptes parking » émanant de CM CIC Securities comportant diverses informations sur les opérations effectuées – aient été exploitées par LFD dans le cadre d’un contrôle.

L’absence de critique du dispositif de contrôle de l’utilisation des « comptes parking » lors du contrôle de l’AMF, dont a fait l’objet AAZ Finances entre 2003 et 2006 sur ses activités à compter du 1er janvier 2002, n’est pas de nature à rapporter la preuve des diligences accomplies par le contrôle interne à l’époque et

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encore moins près de dix ans plus tard. Il n’est donc pas établi que les conditions dans lesquelles les « comptes parking » étaient utilisés ont donné lieu à vérification par le contrôle interne.

— Sur le contrôle des activités exercées à distance

L’activité des gérants officiant « à distance » n’a pas fait l’objet de contrôles en dépit des risques présentés par cette modalité d’exercice en termes de confidentialité et de traçabilité.

L’absence de vérifications n’est d’ail eurs pas contestée par les mis en cause, qui se bornent à invoquer l’absence de signalement fait par X, l’identification de cette lacune par LFD en 2014 et le retard pris dans la mise en œuvre des correctifs en raison du contrôle de l’AMF.

— Sur le contrôle de la circulation d’informations privilégiées

M. B, RCCI de la société lors de la période couverte par le contrôle, a déclaré que LFD ne disposait pas d’une procédure spécifique relative au respect des dispositions prévues par les articles

315-15 et suivants du règlement général de l’AMF dont l’objet est de prévenir la circulation indue d’informations privilégiées. Le RCCI n’était donc en mesure ni de contrôler de manière adéquate cette circulation, alors que les gérants participaient à plusieurs sondages de marché chaque année, ni de détecter des opérations suspectes, ni d’établir la liste d’interdiction prévue par le II de l’article 315-18 du règlement général de l’AMF qui recense les émetteurs ou les instruments financiers pour lesquels le prestataire de services d’investissement doit restreindre ses activités ou celles des personnes concernées.

— Sur le rapport annuel de la conformité et du contrôle interne

Le rapport de l’année 2011 n’a pas été établi et celui de 2012, rédigé par M. B, se borne, pour l’essentiel, à rappeler les obligations règlementaires auxquel es les sociétés de gestion de portefeuil e sont soumises en matière de contrôle, sans faire état des diligences accomplies par le contrôle interne, et à mentionner qu’ « aucune remarque n’est à formuler » et que « lorsque des dysfonctionnements sont identifiés les mesures correctives sont prises dans les meil eurs délais de manière générale ». Enfin, le rapport de l’année 2013, rédigé par X en janvier 2014, ne relève aucune anomalie dans le dispositif de passation des ordres de LFD et recommande seulement d’imprimer les confirmations des intermédiaires.

Ces rapports n’ont permis aux dirigeants de LFD ni de connaître les résultats du travail réalisé en matière de conformité, de contrôle des risques et de contrôle périodique, ni de déterminer si des mesures appropriées avaient été prises, comme l’impose pourtant la réglementation.

L’ensemble des éléments qui précèdent mettent en évidence les importantes insuffisances du contrôle interne de LFD et caractérisent des manquements aux dispositions des articles 313-1, 313-2, 313-7, 313-53, 313-75, 315-15, 315-16 et 315-18 du règlement général de l’AMF.

III.2 Sur le manque d’expertise de la fonction de conformité

Il est reproché à LFD de ne pas avoir disposé d’une fonction conformité bénéficiant de l’expertise nécessaire à l’exercice de sa mission. Selon les notifications de griefs, ce défaut d’expertise est mis en évidence par l’absence de contrôle de second niveau jusqu’en juil et 2013, le défaut de formalisation des contrôles réalisés, l’absence ou l’indigence des rapports annuels de la conformité et du contrôle interne pour les années 2011 et 2012, la méconnaissance par le RCCI des processus de gestion financière déployés par les gérants de portefeuil es, y compris en termes de passation des ordres, de sondage de marché et de recours aux « comptes parking ».

Les mis en cause répondent qu’il est déloyal de fonder le grief sur d’éventuelles déclarations contradictoires faites par M. B lors de son audition par les contrôleurs au regard des conditions particulièrement

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éprouvantes dans lesquel es celle-ci s’est déroulée, la mission de contrôle essayant, selon eux, de le déstabiliser par tous moyens.

A titre liminaire, il y a lieu de relever que les allégations des mis en cause sur les conditions de recueil des déclarations de M. B ne sont étayées par aucune pièce.

M. B, qui était assisté de son avocat avec lequel il a pu s’entretenir hors la présence des contrôleurs lorsqu’il l’a souhaité, ainsi que cela résulte du procès-verbal, a précisé n’avoir rien à ajouter à la fin de son audition.

Les faits visés par la poursuite se situent entre le 26 août 2011, soit trois ans avant la date de l’ouverture du contrôle par le secrétaire général de l’AMF, et la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

Le 1° de l’article 313-3 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction applicable à compter du 1er novembre 2007 et non modifiée sur ce point, prévoit que « Afin de permettre à la fonction de conformité de s’acquitter de ses missions de manière appropriée et indépendante, le prestataire de services d’investissement veil e à ce que les conditions suivantes soient remplies : / 1° La fonction de conformité dispose de l’autorité, des ressources et de l’expertise nécessaires et d’un accès à toutes les informations pertinentes ; […] ».

L’examen du grief qui précède a mis en évidence l’étendue des carences des contrôles qui n’ont pas permis de détecter les nombreux dysfonctionnements dans le processus de passation des ordres, de conservation et d’archivage des données de la piste d’audit.

La Commission relève que, lors de son audition par les contrôleurs de l’AMF, le RCCI s’est trouvé dans l’incapacité de donner des indications sur l’ampleur et la durée du recours aux « comptes parking », a déclaré ignorer que les gérants pouvaient utiliser des « comptes parking » ail eurs qu’auprès de CM-CIC Securities, pensait que les gérants de LFD n’avaient pas eu l’occasion d’avoir accès à des informations privilégiées, alors que ceux-ci participaient plusieurs fois par an à des sondages de marché, et, enfin, n’avait une connaissance précise ni du mode de fonctionnement, ni de l’étendue du recours à la table de négociation externalisée Y, à laquelle LFD avait recours depuis plusieurs mois.

M. A, lors de son audition par le rapporteur, n’a d’ail eurs pas contesté ce grief, indiquant que la fonction de RCCI avait été confiée à compter d’octobre 2015 à la société Marker par un contrat fixant cette prestation à 34 jours homme.

Ces éléments établissent que la fonction de conformité ne disposait pas de l’expertise nécessaire pour s’acquitter de sa mission, de sorte que le manquement de LFD aux obligations prévues par l’article 313-3 du règlement général de l’AMF est caractérisé.

III.3 Sur l’absence de déclaration d’une opération suspecte

Il est reproché à LFD et ses dirigeants d’avoir manqué à l’obligation prévue à l’article L. 621-17-2 du code monétaire et financier de déclarer à l’AMF l’opération réalisée le 31 janvier 2014 sur le titre Nanobiotix par M. A pour le compte de deux clients de LFD alors qu’ils avaient des raisons de suspecter qu’elle pourrait constituer une opération d’initié.

Le 27 janvier 2014, M. A, contacté par téléphone par un employé de la société Gilbert-Dupont, a accepté d’être sollicité en vue d’un sondage de marché. Lors de leur discussion, une information relative à une augmentation de capital, avec maintien au droit préférentiel de souscription, à venir sur la société Nanobiotix a été communiquée à M. A, qui a reçu le même jour un courriel indiquant que cette information était considérée comme privilégiée et qu’il avait reconnu être initié.

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Le 31 janvier 2014, M. A a passé, auprès de CM-CIC Securities, deux ordres d’achat de 4 000 actions Nanobiotix chacun, à un prix de 6,25 euros, pour le compte de deux époux qui avaient confié à LFD un mandat de gestion. Ces ordres, prorogés à plusieurs reprises par M. A, ont été partiel ement exécutés pour le compte de ces clients, à hauteur de 1 188 actions Nanobiotix chacun.

Le 10 février 2014, la société Nanobiotix a annoncé une accélération de son plan de développement et une mise sur le marché anticipée de son médicament phare. Le 11 février 2014, à l’ouverture du marché, le titre Nanobiotix a progressé de plus de 54%.

Le même jour, M. A a adressé à l’ensemble des collaborateurs de LFD un courriel leur rappelant qu’aucune opération ne devait être réalisée sur le titre Nanobiotix en raison d’une clause de confidentialité engageant la société LFD.

Le 13 février 2014, la société Nanobiotix a porté à la connaissance du public qu’elle « envisage[ait] de lancer prochainement une augmentation de capital avec maintien du droit préférentiel de souscription […] ».

Le 21 février 2014, la vente de 1 188 actions Nanobiotix à un prix unitaire de 19,29 euros, a été dépouil ée pour le compte de chacun des époux, opération qui a généré une plus-value d’environ 15 500 euros pour chacun d’eux.

Les mis en cause contestent le caractère privilégié de l’information relative à la prochaine augmentation de capital de la société Nanobiotix en relevant, d’une part, que l’achat de titres Nanobiotix par ce client n’était pas inhabituel au regard de son portefeuil e de titres et du très fort intérêt qu’il portait aux valeurs biotechnologiques, d’autre part, que l’augmentation du capital à venir, par nature dilutive, laissait présager, selon l’analyse d’un investisseur raisonnable, une évolution défavorable du cours, et, ainsi, incitait à la vente plutôt qu’à l’achat de titres.

Ils font valoir que M. A détenait certes l’information en cause mais qu’il n’a pas agi dans le cadre d’un mandat de gestion mais d’un simple service de RTO lors de l’acquisition des titres Nanobiotix, qui a été décidée par l’époux.

Dès lors, ils considèrent qu’ils n’étaient tenus à aucune obligation de déclaration, en l’absence d’opération suspecte.

Les dispositions de l’article L. 621-17-2 du code monétaire et financier dans sa version issue de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010, reprises en substance à l’article 16 du règlement (UE) n° 596/2014 du 16 avril 2014 sur les abus de marché, prévoyaient, au moment des faits, que « Les établissements de crédit, les entreprises d’investissement et les membres des marchés réglementés non prestataires de services d’investissement sont tenus de déclarer sans délai à l’Autorité des marchés financiers toute opération sur des instruments financiers ou des actifs mentionnés au II de l’article L. 421-1, effectuée pour compte propre ou pour compte de tiers, dont ils ont des raisons de suspecter qu’elle pourrait constituer une opération d’initié ou une manipulation de cours au sens des dispositions du règlement général de l’Autorité des marchés financiers ».

Comme y invitent ces dispositions, il convient de rechercher si LFD, et non ses dirigeants, avait des raisons de suspecter que l’opération en cause « pourrait » constituer une opération d’initié, sans qu’il soit nécessaire d’établir que l’information détenue par M. A était privilégiée ou que l’achat de titres Nanobiotix constituait une opération d’initié.

En l’espèce, d’une part, l’information transmise par la société Gilbert-Dupont à M. A le 27 janvier 2014 était relative à l’augmentation de capital à venir de la société Nanobiotix avec maintien du droit préférentiel de souscription.

Lors de la conversation téléphonique du 27 janvier 2014, au cours de laquel e cette information a été transmise à M. A puis par courrier électronique du même jour, il a été clairement indiqué à ce dernier que l’information était considérée par la société Gilbert-Dupont comme privilégiée.

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Ce dernier a d’ail eurs reconnu avoir été initié et, le 11 février 2014 à 14 h 31, a adressé à l’ensemble des collaborateurs de LFD un courriel ayant pour objet « Clause de confidentialité » et qui indiquait : « Comme je vous en ai tous informé, la société est tenue par une clause de confidentialité avec la société NANOBIOTIX depuis quelques jours. A ce titre toute opération est interdite sur cette valeur jusqu’à nouvel ordre. ».

D’autre part, selon les propres déclarations de M. A et du client pour le compte duquel les opérations ont été réalisées, le second a appelé le premier pour passer l’ordre d’achat de titres Nanobiotix, de sorte qu’au moment de cet achat, il avait été en contact avec le détenteur d’une information potentiellement privilégiée sur le titre Nanobiotix.

Ensuite, le client n’était jamais intervenu sur le titre Nanobiotix, qui lui avait pourtant été recommandé depuis plusieurs mois, et n’a revendu ses titres qu’après l’annonce de l’information relative à l’augmentation de capital de Nanobiotix avec maintien du droit préférentiel de souscription alors qu’il aurait pu le faire lorsque le cours avait connu une progression de 54% après l’annonce de la mise sur le marché anticipée du médicament phare de la société, le 11 février 2014. Il a pourtant lui-même déclaré par courriel à la mission de contrôle que le cours s’était apprécié de façon très importante au point de l’inciter à prendre sa plus- value.

Enfin, le maintien du droit préférentiel de souscription ayant pour but d’éviter l’effet dilutif d’une augmentation de capital, l’argument selon lequel la nature de l’opération effectuée par le client, à savoir un achat, et non une vente, lui ôtait son caractère suspect est dépourvu de portée.

Il s’ensuit que LFD avait des raisons de suspecter que les opérations d’achat de titres Nanobiotix réalisées pour le compte de deux clients pouvaient constituer des opérations d’initiés et, partant, qu’elle était tenue de les déclarer sans délai à l’AMF.

Par conséquent, le manquement aux dispositions de l’article L. 621-17-2 du code monétaire et financier applicable au moment des faits et repris en substance, depuis son abrogation, par l’article 16 du règlement n° 596/2014 du 16 avril 2014 relatif aux abus de marché, est caractérisé.

III. Sur l’imputabilité aux dirigeants effectifs de LFD des manquements examinés aux I à III

Les faits visés par la poursuite se situent entre le 26 août 2011, soit trois ans avant la date de l’ouverture du contrôle par le secrétaire général de l’AMF, et la fin des constats de la mission de contrôle, le 17 juil et 2015.

MM. A et B contestent l’imputabilité à leur égard des manquements reprochés à LFD au motif que les notifications de griefs se contentent de dupliquer les constats établis à l’égard de LFD pour les leur imputer, sans démontrer leur implication personnelle, ni l’absence grossière de contrôle ou de surveil ance.

Du 26 août 2011 au mois de juin 2013, M. A a occupé la fonction de directeur général délégué de LFD et M. B celles de président-directeur général et RCCI. A compter du mois de juin 2013, M. A a été nommé président-directeur général, à la place de M. B, qui est devenu directeur général délégué et demeuré RCCI.

Au cours de la période visée, ils avaient tous les deux la qualité de dirigeant effectif de LFD au sens de l’article L. 532-9 du code monétaire et financier.

L’article 313-6 du règlement général de l’AMF, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1er novembre 2007 et non modifiée sur ce point depuis, prévoit que « La responsabilité de s’assurer que le prestataire de services d’investissement se conforme à ses obligations professionnelles mentionnées au II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier incombe à ses dirigeants et, le cas échéant, à son instance de surveil ance. / En particulier, les dirigeants et, le cas échéant, l’instance de surveil ance évaluent

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et examinent périodiquement l’efficacité des politiques, dispositifs et procédures mis en place par le prestataire pour se conformer à ses obligations professionnelles et prennent les mesures appropriées pour remédier aux éventuel es défail ances ».

Dès lors, les manquements de LFD sont également imputables à MM. A et B en leur qualité de dirigeant.

Au demeurant, MM. A et B ont été personnellement impliqués en tant que, respectivement, gérant de portefeuil e et RCCI, dans les manquements retenus à l’encontre de LFD qui ont trait aux procédures de passation et de contrôle des ordres, mises en place par eux, ainsi qu’à la passation des ordres et à son contrôle effectif.

En conséquence, l’ensemble des manquements de LFD relevés précédemment sont imputables à MM. A et B.

IV. Sur le grief notifié à M. A relatif au non-respect de la règlementation relative à la gestion sous mandat

Il est reproché à M. A d’avoir, le 31 janvier 2014, réceptionné et transmis l’ordre de l’un de ses clients, agissant pour son compte et celui de son épouse, alors que les mandats signés par les époux ne leur permettaient pas d’intervenir dans la gestion de leur compte.

Le mis en cause objecte qu’il n’est pas interdit à un client ayant confié un mandat de gestion de donner, à titre exceptionnel, des ordres directs à un gérant financier, lesquels ne s’inscrivent alors pas dans le cadre du mandat de gestion. Selon eux, la seule obligation prévue en la matière qui, en l’espèce, a été respectée par LFD, est, en cas d’interventions fréquentes, de soumettre à la signature du client une convention de RTO, en lieu et place d’un mandat de gestion.

L’article 314-2 du règlement général de l’AMF, qui figure au chapitre IV du titre Premier du livre III de ce règlement, rend applicables aux prestataires de service d’investissement les obligations d’un règlement de déontologie qui a été approuvé et étendu par l’AMF et le premier alinéa de l’article 315-66 du même règlement prévoit que « Les dispositions des chapitres […] IV et […] du présent titre s’appliquent aux personnes concernées mentionnées au II de l’article 313-2 », parmi lesquelles figurent les salariés de ces prestataires.

Il en résulte que les obligations prévues par l’article 60 du règlement de déontologie des OPCVM et de la gestion individualisée sous mandat de l’Association française de la gestion financière (ci-après « AFG ») du 10 décembre 2009, qui a été étendu à l’ensemble des professionnels de la gestion le 15 décembre 2009 en application de l’article 314-2 du règlement général de l’AMF, étaient applicables à

M. A, en sa qualité de gérant de portefeuil e.

Or, aux termes de l’article 60 du règlement de déontologie précité, le prestataire de services d’investissement « doit veil er à ce que l’intervention du mandant sur son portefeuil e, lorsqu’el e est prévue dans le mandat, n’ait lieu qu’à titre exceptionnel, ou qu’el e ne soit due qu’à des contraintes très particulières de gestion de passif, et dans le cadre d’une instruction écrite. Une ingérence systématique dans la gestion doit conduire le gestionnaire à proposer une modification de ses relations contractuel es avec le mandant ».

En l’espèce, les conditions posées par ce texte à l’intervention du mandant n’étaient pas remplies : les mandats des époux ne prévoyaient pas la possibilité d’une intervention directe, l’opération ne répondait pas à des contraintes très particulières de gestion de passif et le client a indiqué qu’il avait passé l’ordre par téléphone alors qu’une instruction écrite était nécessaire.

En conséquence, le manquement aux obligations prévues par l’article 60 du règlement de déontologie des OPCVM et de la gestion individualisée sous mandat de l’AFG est caractérisé à l’encontre de M. A.

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SANCTIONS ET PUBLICATION

Le II de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 dispose :

« La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes :

a) Les personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnel es définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l’article L. 612-39 ;

b) Les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 17° du II de l’article L. 621-9 au titre de tout manquement à leurs obligations professionnel es définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l’article L. 612-39 ; […] ».

Le III de l’article L. 621-15 du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 dispose :

« Les sanctions applicables sont : a) Pour les personnes mentionnées aux 1° à 8°,11°,12°,15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, la radiation du registre mentionné à l’article L. 546-1 ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 100 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ;

b) Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1° à 8°,11°,12°,15° à 17° du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 15 mil ions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c et d du II ou à 300 000 euros ou au quintuple des profits éventuellement réalisés dans les autres cas ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l’autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ; ».

Dès lors, les sanctions encourues par les personnes mise en cause sont l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis, ainsi qu’une sanction pécuniaire pouvant atteindre, pour LFD, la somme de 100 mil ions d’euros et, pour MM. A et B, la somme de 300 000 euros.

Le représentant du Col ège propose à la Commission des sanctions de prononcer une sanction pécuniaire de 100 000 euros à l’encontre de LFD, une interdiction d’exercer pendant trois ans des activités dans le domaine de la gestion d’actifs pour le compte de tiers ainsi que des fonctions de RCSI/RCSI et une sanction pécuniaire de 80 000 euros à l’encontre de M. B, et un blâme et une sanction pécuniaire de 80 000 euros à l’encontre de M. A.

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Pour déterminer quel e sanction retenir, il convient de tenir compte de l’ensemble des circonstances suivantes :

Il doit être souligné que les manquements retenus, qui portent tout à la fois sur le non-respect des conditions d’agrément de la société de gestion, sur des lacunes dans le dispositif de passation des ordres et sur des dysfonctionnements révélateurs de carences du contrôle interne, sont graves et ont, pour la plupart, perduré pendant plus de trois ans.

Par ail eurs, les manquements retenus ont trait à la méconnaissance de procédures que MM. A et B ont personnellement mises en place.

M. A a en outre méconnu les obligations professionnel es auxquelles il était soumis en qualité de gérant de portefeuil e en réceptionnant et transmettant l’ordre reçu par l’un de ses clients en dehors des cas prévus par l’article 60 du code de déontologie des OPCVM et de la gestion individualisée sous mandat de l’AFG, étendu à l’ensemble des professionnels de la gestion.

En ce qui concerne LFD et M. B, il sera également tenu compte de la sanction dont ils ont déjà fait l’objet par décision du 21 juin 2007. La Commission des sanctions a considéré que les

« comptes parking » de la société de gestion AAZ Finances, dénommée à compter du 1er janvier 2011 La Financière Desselligny, avaient fait l’objet d’une utilisation abusive, révélant par ail eurs une défail ance du contrôle interne. El e a, en conséquence, prononcé un blâme à l’encontre de la société, une sanction pécuniaire de 5 000 euros à l’encontre de M. B, président-directeur général et RCCI, et une interdiction d’exercer pendant trois ans des activités dans le domaine de la gestion d’actifs pour compte de tiers, y compris la gestion d’organismes de placement collectif en valeurs mobilières, à l’encontre d’un gérant de portefeuil e exerçant au sein de la société de gestion.

Force est de constater que les mis en cause n’ont pas tiré les leçons de cet avertissement.

Les mis en cause font valoir que la société a maintenant remédié aux dysfonctionnements constatés par la mission de contrôle, notamment en mettant en place de nouveaux outils et en déléguant des missions de contrôle à de nouveaux prestataires extérieurs, auxquels plus de moyens ont été accordés.

M. B a déposé des pièces justifiant du montant de son salaire et de celui de son épouse, de leurs charges et du fait qu’ils sont propriétaires de leur résidence. M. B détiendrait aussi des titres Dessel igny via une EURL.

M. A a produit de même sa feuil e d’impôt sur le revenu de 2016 qui fait apparaître le montant total de son salaire et de celui de son épouse. Ils sont propriétaires d’un appartement et remboursent les échéances d’un prêt immobilier. M. A participe au capital de LFD. Son épouse a perdu son emploi.

LFD, de son côté, a produit son bilan au 31 décembre 2016, non encore certifié par les commissaires aux comptes. On relève que le chiffre d’affaires est de 1 520 334 euros, le bénéfice de 36 791 euros, les disponibilités de 260 403 euros et les valeurs mobilières de placement de 100 691 euros.

Au vu des éléments ci-dessus exposés et en tenant compte de la situation financière personnelle des mis en cause telle qu’ils l’ont exposée, les sanctions suivantes doivent être appliquées : un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 euros pour MM. B et A et une sanction pécuniaire de 80 000 euros pour LFD.

Aux termes de l’article L. 621-15, V, du code monétaire et financier, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 : « La décision de la commission des sanctions est rendue publique dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, dans un format proportionné à la faute commise et à la sanction infligée. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. / La commission des sanctions peut décider de reporter la publication d’une décision ou de publier cette dernière sous une forme anonymisée ou de ne pas la publier dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes : / a) Lorsque la publication de la décision est susceptible de causer à la personne en cause un préjudice grave et disproportionné, notamment, dans le cas d’une sanction infligée à une personne physique, lorsque la

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publication inclut des données personnel es ; / b) Lorsque la publication serait de nature à perturber gravement la stabilité du système financier, de même que le déroulement d’une enquête ou d’un contrôle en cours ».

Aucune des circonstances alléguées par les mis en cause, relatives aux mesures correctrices mises en œuvre par la société ainsi qu’à leur collaboration avec l’AMF dans la détermination des solutions les mieux adaptées, n’est de nature à justifier une absence de publication ou une publication sous forme anonyme de la décision à intervenir.

PAR CES MOTIFS,

Et après en avoir délibéré, sous la présidence de Mme Marie-Hélène Tric, par Mme Edwige Belliard, Mme Sophie Schiller, MM. Bruno Gizard et Miriasi Thouch, membres de la 1ère section de la Commission des sanctions, en présence de la secrétaire de séance,

Prononce :

— à l’encontre de la société La Financière Dessel igny une sanction pécuniaire de 80 000 € (quatre-vingt mille euros) ;

- à l’encontre de M. A un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 € (cinquante mil e euros) ;

- à l’encontre de M. B un blâme et une sanction pécuniaire de 50 000 € (cinquante mil e euros) ;

Ordonne la publication de la présente décision sur le site Internet de l’Autorité des marchés financiers.

À Paris, le 22 février 2017,

La Secrétaire de séance,

La Présidente,

Anne Vauthier

Marie-Hélène Tric

Cette décision peut faire l’objet d’un recours dans les conditions prévues à l’article R. 621-44 du code monétaire et financier.

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  • I. Les faits
  • II. La procédure
  • I. Sur le grief relatif au non-respect par LFD de ses conditions d’agrément et au défaut d’information de l’AMF
    • II.1 Sur les procédures et les moyens techniques
    • - Sur les procédures
    • - Sur les moyens techniques utilisés
    • II.2 Sur les dysfonctionnements relatifs à l’utilisation des comptes parking, à l’affectation des ordres et à la piste d’audit
    • - Sur l’utilisation des « comptes parkings » non conforme aux procédures
  • II. Sur le grief relatif au défaut de contrôle interne
    • III.1 Sur les carences du contrôle interne
    • III.2 Sur le manque d’expertise de la fonction de conformité
    • III.3 Sur l’absence de déclaration d’une opération suspecte
  • Sanctions et publication

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Décision de la Commission des sanctions du 22 février 2017 à l'égard de la société La Financière Desselligny et de MM. A et B